Anne a grandi avec un père boucher. Elle s’est vite découvert une passion pour la viande et les couteaux. Elle est loin d’être rebutée par la vue du sang et le travail physique. Quand son père disparaît, elle décide de reprendre l’affaire familiale à Rouen.

Stacey a grandi avec une mère prostituée. Pour l’honorer, elle a décidé très jeune de suivre ses traces. De foyers, en maisons d’accueil, elle tombe sur une éducatrice qui pense qu’elle ferait une bonne bouchère. C’est une boutade mais Stacey la prend au mot. Elle s’inscrit en CAP de boucherie et y rencontre Anne.

Ce sont les deux seules filles de la promo. Entre regards concupiscents, remarques sexistes et mains baladeuses des autres élèves, elles se frayent un chemin vers leur rêve, dans une profession dominée par les hommes.

Quelques années après leur diplôme, Anne contacte Stacey pour l’accompagner dans sa nouvelle aventure entrepreneuriale. Leurs compétences sont indéniables.
Leur concept est original : peindre la devanture de la boutique en rose, valoriser la viande, exposer les morceaux comme des bijoux, installer des tabourets de bar autour du billot pour converser avec les clients.

Michèle vient de Guinée. Elle a besoin d’un travail pour renouveler son titre de séjour. Elle n’est pas spécialement fan de viande mais rejoint le trio quand Anne et Stacey décident de recruter quelqu’un pour les aider avec la caisse et l’accueil.

Très vite elle s’intègre au groupe. Looks atypiques, ongles longs colorés, coiffures punk, biceps tatoués, grosses motos cylindrées, les bouchères attisent la curiosité et les désirs.

Chacune découvre les blessures des autres, la violence qui les a modelées, quelques secrets du passé. Un père dévasté par la mort de sa femme qui se met à convoiter sa fille, un petit ami violent qui s’épanouit dans la domination et la maltraitance de l’autre, un patron qui viole ses employées en situation irrégulières. La complicité de travail devient alors une amitié forte puis une sororité. Ensemble elles font front face à l’adversité.

Quand plusieurs hommes de leur entourage disparaissent sans laisser de traces, les soupçons se portent sur les bouchères. Des femmes aussi jeunes qui manient le couteau avec autant de dextérité, forcément, il y a anguilles sous roche. D’ailleurs est-ce que la viande qu’elles servent est vraiment de la viande animale?

Les héroïnes du livre ont un air de  » Mamie Luger » de Benoît Philippon. Elles font aussi penser au trio dans « femmes sans merci » de Camilla Läckberg.

Inceste, abus, violence, harcèlement, chacune des bouchères a eu maille à partir avec la gente masculine à un moment de sa vie et en porte les séquelles. On a envie de dire que Sophie Demange exagère, qu’il n’y a pas autant d’hommes nuisibles au mètre carré, autant de femmes traumatisées et blessées, mais force est de constater que c’est une réalité là-bas comme ici.

En février, après un énième féminicide, une dame a fait un statut pour raconter comment un instituteur avait essayé de l’apater avec une mandarine. Sous son poste, un millier de femmes ont fait écho à son histoire, certaines en partageant des témoignages personnels. Je mets le lien ici.
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Allez lire et voyez comment vos filles, vos femmes, vos sœurs, vos mères ont souffert, souffrent et continuent de souffrir et de subir.

Certaines ne se rendent pas compte que ce qu’elles ont subi était mal.
Certaines savent et se taisent.
D’autres parlent mais ne sont pas écoutées.
Quelques unes sont entendues.
Peu de coupables sont punis.
Toutes, absolument toutes, sont marquées.